L’inertie aux réformes d’un État

L’Etat est, selon moi et de façon concrète, l’ensemble des organisations administratives publiques d’un pays. C’est une machine complexe , lourde avec son histoire , ses traditions de fonctionnement . Sa fonction principale , c’est gérer la vie commune de la société selon une charte de valeurs et un ensemble de lois fixant les droits et devoirs de chaque citoyen. Les rouages administratifs de l’Etat ont donc une tâche d’exécution esssentiellement.

C’est obligatoirement une structure vivante , dynamique qui doit évoluer avec le temps, et suivre le rythme d’évolution de la société, du savoir et de l’environnement international . De plus , aucun dirigeant politique n’est capable de faire respecter ses ordres par ses subordonnés , à la lettre et sans distorsion et à tout moment , comme tout processus de communication, d’où la nécessité continue de perfectionnement . Cette évolution peut être un petit ajustement plus ou moins périodique ou carrément une réforme substantielle .

Un rouage s’occupe d’un ensemble spécifique de tâches. Chaque rouage peut dans une certaine mesure se réformer et améliorer son rendement. Mais l’Etat tout entier ne s’améliore pas forcément en améliorant un ou plusieurs de ses rouages , en procédant par service après service, car les rouages sont interdépendants. Il peut être en situation de rupture avec les avec l’évolution technique par exemple . L’Etat , en première approximation, est semblable à une machine mécanique dont les pièces sont les analogues des rouages de l’Etat. Une pièce de cette machine peut être réparée voire être améliorée mais cette amélioration est fort limitée car elle doit s’insérer dans l’ensemble des pièces. Ainsi , le processus d’amélioration globale de la machine est limité ou même bloqué par le schéma global de la dite machine. J’appelle cet état de fait "INERTIE" de la machine. Elle freine ou ralentit la nécessaire adaptation aux nouveaux besoins. Les constructeurs de la machine ne peuvent qu’inventer une nouvelle machine qui répond mieux aux nouveaux besoins.
Toute organisation a une INERTIE similaire. Elle trouve des difficultés à s’adapter aux nouveaux besoins, et aux nouveaux environnements : social, économique, culturel, internationnal. Cette inertie existe dans toute organisation , et visible particulièrement dans le cas des organisations complexes et comportant de très nombreux rouages . Faire de l’auto-réforme globale pour s’adapter aux temps nouveaux est pratiquement impossible pour une organisation, car chaque organisation a une fonction, qu’elle assure avec ses objectifs en vue, raison première de son existence, avec ses réflexes et ses traditions et toute sa propre histoire. Pour se réformer profondément, elle ne peut que créer une organisation qui a pour fonction exclusive l’invention d’une nouvelle organisation mais à la différence des machines mécaniques, une nouvelle organisation dont la matière première est justement le personnel de la vieille organisation. Cette nouvelle organisation chargée de la réforme , doit avoir la capacité d’imagination, en plus de la connaissance globale des "rouages" de l’organisation désuette, de ses difficultés d’adaptation aux exigences du moment. C’est le cas notamment d’une situation de rupture ou une situation révolutionnaire . Je cite l’exemple de l’Etat qui veut se digitaliser. Il ne peut le faire en incitant , chaque ministère, chaque service de se digitaliser de lui même. La nécessité d’un nouveau schéma de l’Etat est nécessaire. Les informaticiens connaissent bien les problèmes de montage des rouages , mais ils ne peuvent travailler seuls pour l’invention de cette nouvelle organisation. La réforme globale est une tâche fortement pluridisciplinaire et même transdisciplinaire.
La réforme qui doit répondre aux objectifs de la Révolution n’est pas uniquement relative à la constitution et elle n’est pas non plus simplement politique. Elle doit être également et en même temps économique, sociale et culturelle. La démocratie est imposée par l’environnement culturel mondial d’aujourd’hui , encore faut-il que la démocratie s’adapte aux nouveaux paradigmes de la communication , de l’échange des idées, des marchandises et des personnes.

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2023-01-30
Taoufik Karkar